Contexte
Le régime cétogène, caractérisé par une alimentation très riche en graisses et très pauvre en glucides, est utilisé depuis près d’un siècle en neurologie, notamment dans le traitement de l’épilepsie. Plus récemment, il a gagné en popularité comme méthode de perte de poids et de contrôle métabolique. L’organisme, privé de glucose, apprend à utiliser les corps cétoniques produits par le foie comme source d’énergie.
Si les résultats à court terme incluent souvent une perte de poids et une amélioration de certains paramètres métaboliques, la question de la sécurité d’un suivi prolongé reste ouverte.
L’étude sur modèle murin
Une équipe dirigée par la physiologiste Molly Gallop (Earlham College, Indiana) a publié dans Science Advances des résultats issus d’une expérimentation sur des souris nourries au régime cétogène pendant environ un an — ce qui équivaut à plusieurs décennies chez l’humain.
Les observations révèlent plusieurs points préoccupants :
- Glucose et insuline : les souris céto présentaient une intolérance au glucose et un dysfonctionnement des cellules pancréatiques productrices d’insuline. Leur capacité à réguler la glycémie était altérée.
- Foie : les mâles développaient une stéatose hépatique associée à un fonctionnement anormal de l’organe.
- Système cardiovasculaire : présence d’excès de graisses circulantes dans le sang, marqueur précoce de pathologies cardiovasculaires.
Malgré ces effets délétères, les souris céto maintenaient un poids inférieur à celui des souris nourries avec un régime de type occidental, confirmant l’efficacité du cétogène sur le contrôle pondéral.
Réversibilité et implications cliniques
Un point important ressort de cette étude : les troubles glycémiques observés étaient réversibles après l’arrêt du régime. Ce constat suggère que certains effets indésirables du cétogène à long terme ne sont pas irréversibles.
Cependant, ces résultats soulignent plusieurs implications pour la pratique clinique :
- Suivi médical indispensable : un régime aussi restrictif ne devrait pas être recommandé sans encadrement médical, en particulier chez les patients à risque de troubles hépatiques, cardiovasculaires ou métaboliques.
- Personnalisation des approches : la balance bénéfices/risques doit être évaluée selon le profil du patient (âge, sexe, statut hormonal, comorbidités).
- Recherche nécessaire chez l’humain : les données animales ne sont pas toujours transposables directement, mais elles imposent une vigilance accrue.
Conclusion
Le régime cétogène reste un outil thérapeutique puissant, notamment à court terme et dans des contextes précis (épilepsie, obésité sévère, diabète). Mais son usage prolongé pourrait induire des effets secondaires notables, en particulier sur la régulation du glucose, la fonction hépatique et le système cardiovasculaire.
Source :
M.R. Gallop et al.
Un régime cétogène à long terme provoque une hyperlipidémie, un dysfonctionnement hépatique et une intolérance au glucose due à une sécrétion d’insuline altérée chez la souris.
Science Advances. Publié en ligne le 19 septembre 2025.
doi : 10.1126/sciadv.adx2752