Montréal, septembre 2025 — Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) marque un tournant important dans la compréhension des mécanismes du sommeil, en identifiant le récepteur MT1 de la mélatonine comme régulateur essentiel du sommeil paradoxal (REM). Cette découverte ouvre la voie à des approches thérapeutiques innovantes pour les troubles du sommeil et certaines pathologies neuropsychiatriques.
Le sommeil paradoxal, phase caractérisée par l’activité onirique intense, la consolidation mnésique et la régulation émotionnelle, est souvent perturbé dans des affections graves telles que la maladie de Parkinson ou la démence à corps de Lewy. Ces maladies demeurent à ce jour sans traitement curatif.
L’étude, publiée dans le Journal of Neuroscience, révèle que le récepteur MT1 de la mélatonine agit sur un type particulier de neurones situés dans le locus coeruleus (ou « tache bleue »), une région cérébrale productrice de noradrénaline. Normalement actifs en période d’éveil, ces neurones cessent leur activité durant le sommeil paradoxal. L’activation ciblée du récepteur MT1 par un nouveau composé pharmacologique permettrait de moduler cette inhibition neuronale et d’augmenter la durée du sommeil paradoxal, selon les résultats obtenus chez des modèles animaux.
« Cette découverte ne représente pas seulement une avancée dans la compréhension des mécanismes du sommeil, elle offre également un fort potentiel clinique, notamment pour le développement de traitements ciblés », explique la Dre Gabriella Gobbi, chercheuse principale de l’étude, professeure de psychiatrie à l’Université McGill et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en thérapeutique en santé mentale.
Contrairement aux hypnotiques actuels, qui prolongent la durée totale du sommeil mais nuisent souvent à la qualité du sommeil paradoxal, ce nouveau traitement agirait de façon sélective sur cette phase, sans altérer les autres cycles du sommeil.
Pour le Dr Stefano Comai, co-auteur de l’étude et professeur à l’Université de Padoue, « il s’agit du premier médicament expérimental ciblant spécifiquement le sommeil paradoxal, ce qui représente une avancée significative dans le domaine de la neuropharmacologie du sommeil. »
Implications cliniques et perspectives futures
Cette découverte constitue une étape déterminante dans la recherche sur les troubles du sommeil et les affections neurodégénératives. En ciblant spécifiquement les récepteurs MT1, les scientifiques espèrent mettre au point de nouveaux traitements capables de restaurer un sommeil fonctionnel, facteur clé dans le ralentissement de la progression de certaines maladies neurologiques.
Des recherches supplémentaires seront nécessaires pour valider l’efficacité de cette approche chez l’humain, mais ces résultats offrent une base solide pour l’élaboration de futures stratégies thérapeutiques centrées sur les régulations fines du sommeil.
Conclusion
Cette percée scientifique redéfinit les perspectives de traitement des troubles du sommeil, en mettant en lumière le rôle crucial du récepteur MT1 de la mélatonine dans la régulation du sommeil paradoxal. Pour les professionnels de la santé, cette avancée représente une opportunité majeure de mieux comprendre les liens entre sommeil, cognition et pathologies psychiatriques ou neurologiques, et d’envisager des prises en charge plus ciblées et efficaces.
Source :
« Amélioration sélective du sommeil paradoxal (REM) chez les rats mâles grâce à l’activation des récepteurs de la mélatonine MT1 situés dans les neurones noradrénergiques du locus cœruleus »
par Martha López-Canul, Qianzi He, Tania Sasson, Mohamed Ettaoussi, Danilo De Gregorio, Rafael Ochoa-Sanchez, Helene Catoire, Luca Posa, Guy Rouleau, Jean Martin Beaulieu, Stefano Comai et Gabriella Gobbi, 16 juillet 2024, Journal of Neuroscience.
DOI : 10.1523/JNEUROSCI.0914-23.2024