Introduction
Le fer est un micronutriment essentiel à la vie. Il intervient dans le transport de l’oxygène, la respiration cellulaire, la synthèse de l’ADN et de nombreuses réactions enzymatiques. Pourtant, son excès constitue un danger silencieux. Au-delà d’un certain seuil, le fer devient pro-oxydant, pro-inflammatoire et accélère le vieillissement vasculaire et métabolique. L’objectif n’est donc pas la supplémentation systématique, mais le maintien d’un équilibre strict.
Le fer : entre carence et surcharge
L’organisme ne possède aucun mécanisme actif d’élimination du fer. Toute absorption excessive s’accumule dans les tissus (foie, pancréas, cœur, système vasculaire). La régulation repose principalement sur l’hepcidine, hormone hépatique qui module l’absorption intestinale et la libération du fer stocké.
Lorsque cette régulation est altérée — par une prédisposition génétique, des apports excessifs ou des transfusions répétées — la surcharge devient délétère.
Les effets pro-oxydants de la surcharge
Le fer libre favorise la formation de radicaux hydroxyles via la réaction de Fenton. Ces radicaux provoquent une oxydation massive des lipides, protéines et acides nucléiques. Cette agression oxydative altère la membrane cellulaire, accélère la sénescence et perturbe la signalisation cellulaire.
Les LDL oxydées, en particulier, sont un facteur clé de l’athérogenèse : elles s’accumulent dans la paroi artérielle, déclenchant une réponse inflammatoire chronique.
Conséquences inflammatoires et cardiovasculaires
Un excès de fer entretient une inflammation systémique de bas grade. Il stimule la production de cytokines pro-inflammatoires (IL-6, TNF-α) et active les macrophages M1.
Sur le plan vasculaire, il perturbe la fonction endothéliale, réduit la biodisponibilité du monoxyde d’azote et favorise l’agrégation plaquettaire. Ces mécanismes expliquent le lien établi entre surcharge ferrique, athérosclérose et maladies cardiovasculaires (infarctus, insuffisance cardiaque, troubles du rythme).
Dans les formes sévères (hémochromatose, transfusions multiples), l’accumulation myocardique de fer conduit à une fibrose cardiaque et à une cardiomyopathie dilatée.
Prévention et suivi clinique
Une approche prudente s’impose dans l’interprétation de la ferritine et de la saturation de la transferrine.
Les valeurs élevées doivent être analysées dans leur contexte inflammatoire, métabolique ou génétique.
Le dépistage précoce de la surcharge ferrique repose sur :
- La mesure régulière de la ferritine sérique et du coefficient de saturation de la transferrine ;
- L’évaluation du profil hépatique et métabolique ;
- Une attention particulière aux patients recevant des transfusions chroniques, des suppléments non justifiés ou présentant une hémochromatose familiale.
La phlébotomie thérapeutique, la chélation et la réduction des apports en fer sont les principales stratégies correctives selon la gravité de la surcharge.
Conclusion
Le fer illustre parfaitement la loi du juste équilibre biologique : indispensable à faible dose, toxique lorsqu’il s’accumule. Sa gestion clinique exige une vigilance constante, fondée sur une évaluation individualisée des besoins, des apports et du statut ferrique. Préserver cet équilibre, c’est protéger à la fois les cellules, les vaisseaux et la longévité métabolique.
Le fer n’est pas toujours bénéfique : l’excès est pro-oxydant, pro-inflammatoire et favorise les maladies cardiovasculaires. Il faut viser l’équilibre, pas la surcharge.
Références
- Iron Overload and Cardiovascular Disease, PubMed, 2024.
- High Circulating Iron Levels Are a Risk Factor for Cardiovascular Disease, Blood, American Society of Hematology.
- Pathological Roles of Iron in Cardiovascular Disease, PMC Review, 2023.
- Cardiac Iron Overload: Clinical Manifestations and Management, Hearts, 2025.
- Asalah et al., Ferritin, Cytokines and Oxidative Stress in Iron Overload, 2024.