Des chercheurs du Francis Crick Institute ont découvert comment des structures microscopiques appelées gouttelettes lipidiques peuvent contribuer à empêcher qu’un régime riche en graisses ne provoque des lésions rénales.
Les travaux réalisés sur des mouches à fruits, publiés dans PLoS Biology, ouvrent une nouvelle voie de recherche pour la mise au point de meilleurs traitements contre les maladies rénales chroniques.
La consommation d’aliments riches en graisses peut provoquer une inflammation et un stress métabolique dans les reins, entraînant une maladie chronique qui, dans les cas graves, nécessite une dialyse ou une transplantation. L’obésité étant en hausse dans le monde, le problème ne cesse de s’aggraver. Au Royaume-Uni, environ 10 % des personnes vivent avec une maladie rénale chronique.
Les scientifiques du Crick ont étudié une caractéristique commune de la maladie, l’apparition de gouttelettes de lipides à l’intérieur des cellules rénales, afin de résoudre un mystère de longue date, à savoir si cela protège ou nuit à la fonction rénale.
En collaboration avec des experts en microscopie électronique du Crick, l’équipe a utilisé les méthodes génétiques sophistiquées disponibles chez la mouche à fruits (drosophile) pour montrer que les gouttelettes lipidiques protègent le système rénal contre les dommages causés par un excès de graisses alimentaires.
En cas de régime alimentaire riche en graisses, les gouttelettes lipidiques s’accumulent à l’intérieur des néphrocytes, l’équivalent chez la mouche des cellules rénales humaines appelées podocytes. Là, les gouttelettes agissent comme un “refuge” pour stocker les graisses excédentaires à l’écart du reste de la cellule. Une enzyme appelée ATGL se trouve à la surface des gouttelettes lipidiques et aide à éliminer les graisses stockées de manière sûre. Pour ce faire, l’ATGL transmet les graisses sous une forme digeste aux mitochondries voisines, où elles peuvent être décomposées en molécules moins toxiques.
Les gouttelettes lipidiques sont essentielles au processus de protection. En effet, lorsque les scientifiques ont utilisé des méthodes génétiques pour empêcher leur formation, les graisses laissées libres à l’intérieur des néphrocytes ont causé des dommages substantiels et altéré la fonction rénale.
Alex Gould, chef du laboratoire de physiologie et de métabolisme au Crick et chercheur principal de l’étude, déclare : “On sait depuis de nombreuses années que les gouttelettes lipidiques apparaissent dans un large éventail de maladies, du diabète au cancer du cerveau. Ce qui est beaucoup moins clair, c’est de savoir si elles améliorent ou aggravent les choses”.
“Il est passionnant de constater que les gouttelettes lipidiques jouent un rôle essentiel dans la lutte du rein contre la surcharge en graisses. Ces structures fascinantes s’avèrent être bien plus que de minuscules boules de graisse, et nous voulons maintenant savoir si leur rôle protecteur dans le rein s’applique également à d’autres contextes pathologiques.”
Les scientifiques ont également constaté que le renforcement de l’expression de l’enzyme ATGL chez les mouches à fruits permettait de réparer la plupart des dommages causés par un régime riche en graisses et de rétablir la fonction normale des cellules rénales.
La mouche à fruits est un modèle utile pour comprendre la biologie des maladies rénales chez l’homme, car le système rénal des deux espèces présente d’importantes similitudes, notamment la présence de l’enzyme ATGL.
Ola Lubojemska, qui a réalisé une grande partie de ces travaux au sein du laboratoire de physiologie et de métabolisme du Crick, explique : “Ces résultats n’en sont qu’à leurs débuts, mais ils ouvrent une nouvelle voie à la recherche clinique sur les maladies rénales chroniques. Il pourrait, par exemple, être possible de mettre au point un médicament qui stimulerait l’enzyme ATGL chez les patients souffrant d’insuffisance rénale. Cela permettrait aux graisses alimentaires en excès d’être détoxifiées plus efficacement par les cellules rénales, améliorant ainsi la fonction rénale.”
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